Cachée au milieu d’une forêt de chênes-lièges et de châtaigniers, à proximité du village de Collobrières, la Chartreuse de la Verne est pourtant bien connue des randonneurs qui arpentent le massif des Maures, haut lieu du Var situé entre Hyères et Fréjus.
Une Histoire Mouvementée
Il faut dire que son histoire, mouvementée, est aussi ancienne. Avant elle, le prieuré de Notre Dame de la Verne occupait déjà le promontoire rocheux où elle est nichée. Parmi les nombreuses origines possibles de ce nom, on évoque l’existence à cet endroit d’un ancien temple païen dédié à la déesse Laverna, protectrice des voleurs, particulièrement bien lotis dans cet endroit isolé. Mais les historiens penchent plutôt pour une seconde hypothèse : l’utilisation du vernium, qui désigne l’aulne en latin populaire, arbre très fréquent dans la vallée proche, et dont le dérivé provençal est verno.
C’est en tout cas sur cet édifice abandonné que deux évêques locaux, Pierre Isnard et Frédol d’Anduse, fondèrent en 1170 la Chartreuse de la Verne. Son influence grandit rapidement en même temps que son patrimoine, grâce à de nombreuses donations ou l’achat de terres et forêts alentour.
Hélas, elle connut plusieurs incendies particulièrement destructeurs au XIIIe et XIVe siècles. Étonnamment, seule l’église romane subsista à chaque fois. Elle subit également par la suite les attaques de nombreux pillards issus de la région ou des Sarrasins, venus lors des guerres de religion. Ces derniers, semble-t-il, eurent raison de la voûte de l’édifice vieux de quatre-cents ans.
Reconstruction et Renaissance
La Chartreuse de la Verne fut néanmoins toujours reconstruite, et son rayonnement spirituel perdura jusqu’à la Révolution. Celle-ci marqua le début d’un long retrait, avec la mise sous séquestre de ses possessions, puis leur vente comme biens nationaux et le départ des chartreux.
En effet, le monastère tomba dans l’oubli pendant presque deux siècles, et pâtit des assauts de la nature ou de promeneurs peu scrupuleux. Pourtant, nommé inspecteur général des monuments historiques en 1834, Prosper Mérimée (l’auteur de « Carmen ») l’avait inscrit sur sa liste de sites remarquables. Et il fut même classé monument historique en 1921 au titre de « vestiges dans la forêt ». Mais cela ne changea rien pour la Chartreuse de la Verne.
Son renouveau, elle le doit d’abord à l’association « Les amis de la Verne ». Créée en 1968 par mesdames Annette Englebert et Annick Lemoine, celle-ci œuvrera durant quatorze ans pour sa rénovation, malgré des moyens limités.
Une Nouvelle Ère pour la Chartreuse à la fin XXè siècle
Ceci contribua néanmoins au retour de moines et, à partir de 1986, des moniales de la famille monastique de Bethléem, de l’Assomption de la Vierge et de Saint-Bruno, avec pour principal avantage l’arrivée massive de nouveaux financements. Ainsi, l’action conjuguée de l’Église, du département des monuments historiques, de diverses collectivités territoriales, et de l’association donna lieu à des travaux beaucoup plus importants, dont la reconstruction de l’église romane et du grand cloître. Aujourd’hui, le site a quasiment repris sa forme originelle : un rectangle de 155 m de long sur 85 de large, entouré de remparts.
Et, malgré la présence des religieuses, il est parfaitement visitable : le public peut venir admirer sa monumentale porte d’entrée construite en pierre de serpentine, du marbre volcanique issu du massif des Maures. Il peut également découvrir entre autres le grand cloître, la grange, la boulangerie et la cellule témoin en toute liberté. En ce qui concerne l’église romane, exceptionnellement partagée avec les occupantes des lieux, aucun bruit n’est permis.
La vie Monastique aujourd’hui
Car l’ordre des chartreux, qui tient son nom d’un massif proche de Grenoble, est un des plus austères : outre un silence quasi permanent, les moniales vivent recluses dans l’enceinte du monastère, voire dans leur cellule, où elles passent la plus grande partie de la journée. En dehors des moments consacrés à la prière, elles travaillent à la production et la vente de produits artisanaux comme des confitures, des biscuits, du miel ou des savons. D’un point de vue alimentation, de fréquents jeûnes et un régime sans viande sont de rigueur. Quant aux visites de la famille, elles sont limitées à deux jours par an. En ce qui concerne leur habillement, simplicité et uniformité sont, bien sûr, de mise : des vêtements blancs avec une capuche et un scapulaire.
Elles vivent également des recettes des visites. Et, si cela ne suffit pas, l’ordre des Chartreux prévoit que la maison-mère, le monastère de la Grande Chartreuse, les aide financièrement, grâce aux importants revenus tirés de la liqueur qu’elle commercialise dans le monde entier.
Visiter la Chartreuse de la Verne : infos pratiques
Se rendre au monastère Notre Dame de Clémence (c’est son nom officiel), c’est donc plus que déambuler entre les murs de bâtiments religieux marqués par l’Histoire. C’est, après avoir serpenté à travers le massif des Maures via une petite route depuis Collobrières, rejoindre un écrin de verdure situé à 425 m d’altitude, où règne un calme absolu, propre à la sérénité et au recueillement.
Si cela vous tente, pensez à vous renseigner au préalable sur les conditions d’accès du jour auprès de l’office du tourisme de Collobrières ou sur le site de la préfecture du Var, car la route peut être barrée du 21 juin au 20 septembre afin de prévenir les risques d’incendie. Par ailleurs, la Chartreuse de la Verne est fermée les jours fériés.
Niveau tarifs, la visite, qui dure une à deux heures en fonction de votre rythme, coûte 7 € par adulte, et 3 € pour les 12-18 ans. Mais rien ne vous empêche de profiter plus longtemps de la beauté et de la tranquillité du site, à pied ou à vélo, à travers les chemins qui l’entourent.
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